R.I.P
Eulogie
Il est parti
Ainsi, il ne remplira plus de manière quasi religieuse le petit Almanach rouge, où il notait, entre le montant des retraites des anciens présidents de la République et les horaires de la poste, les températures minimales ou maximales, le temps qu’il faisait ; les grands événements comme les mariages, les anniversaires ou les naissances de ses arrières petites filles et les petites choses comme les trous à vider, les arbres à abattre ou les visites chez le médecin.
Il est parti.
Ainsi, on ne l’entendra plus vitupérer contre la pluie ou le froid, se plaindre du gouvernement qui ne dirige pas la météo, se moquer des chevelus, mal rasés de la tête et autres vedettes, illusoires ou avérées, qui se vendaient en faisant des publicités et qu’il affublait du doux vocable de M.M
On ne l’écoutera plus raconter ses sempiternelles blagues (dont, avouons-le désormais, toutes n’étaient pas drôles) ou narrer ses aventures à Bourg Saint-Maurice, la construction du barrage de Tignes et les enquêtes criminelles, il ne bougonnera plus « on ne sait plus comment on vit » et « cela me fout en bas ».
Il est parti
J’aurais pu dire tant de choses encore : parler de son dynamisme jusqu’à il y a quelques mois encore, son implication dans le village dont il était une figure, les associations locales auxquelles il participait et sa fierté de porte drapeau, mais aussi ses inquiétudes et ses (rares) emportements.
Je n’oublierais pas non plus qu’il m’a accueilli dans sa famille comme un petit-fils, je crois.
En tous cas, pour moi qui en était dépourvu, j’avais trouvé un autre grand-père.