Requiem

La musique de Bach s’élève lentement dans l’habitacle : grandes orgues et puissance de la foi ..

Des images confuses apparaissent, crevant le brouillard : 

Autres images d’églises, un chœur entonne un Te Deum, des cloches sonnent à toute volée ; c’est aujourd’hui jour de noces. 
 Sur le ruban lumineux et bleuté de l’autoroute, quelques voitures, indifférentes, quelques passagers, insouciants, continuent leur ronde effrénée. 

Deux ou trois notes de polka, et le film continue : gros plan sur une fête foraine, un manége qui tourne, vole et virevolte.

Une enfant rit, sa robe tourbillonne ; sur un banc, un homme, son père, la regarde rire, la regarde vivre.

Egarée dans le lointain, on entend la mélodie à deux tons d’une ambulance, augure funeste et musicale.

 

Purcell succède à Bach : « Musique pour les funérailles de la Reine Mary », sinistre, grave et noire. Noire, comme un amour mort.  

Deux ou trois mots de trop, des regards un peu trop durs ou, au contraire, un peu trop doux ; quelques mensonges fatals ; et vient le règne du noir.  

Le soleil fait ses adieux, le tonnerre gronde, l’atmosphère s’assombrit. C’est l’heure des bruits : cris, hurlements, excitation, exhortations, claquement de la civière qu’on déplie, sonnerie frénétique des portables, bip inquiets des appareils de réanimation... 

Ce soir, sur l’autoroute, un homme dort : heureux, serein, apaisé. Son sourire s’est figé en rictus, mais ses yeux contemplent le ciel et les étoiles.

Il a la nuque brisée

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :