Saines lectures

Publié le par Fred


A travers le J.O, c’est tout un échantillon de la vie administrative et politique française qui se dévoile au profane.

Il a beau se masquer sous un jargon rugueux et quelque peu technique ; il sait tomber le masque : à vrai dire, il n’y a rien de plus divertissant ni de plus dépaysant que la lecture du Journal officiel.

 

Le dérisoire y côtoie le fondamental : les grandes réformes législatives et constitutionnelles y apparaissent neutres, ternes, presque affadies, bien loin des passions et polémiques qui les ont fait naître.

 

Au contraire, arrêtés, circulaires et notices y gagnent en importance, accèdent à la gloire furtive de la parution.

Quoi de plus empreint de poésie, en effet que ces «  spécialités pharmaceutiques agréées à l’usage des collectivités et divers services publics « ( arrêté du 13/09/2000, parution le 22/09/2000, et quel courage il a fallu à M le sous-directeur du financement de systèmes de soin pour signer ce brûlot), que dire de l’audace de cette norme de prothèse ontologique décrite au JO du 12 Octobre.

 

Ne croyez cependant pas que le JO ne s’attache qu’à honorer des choses inanimées . Les mesures nominatives occupent plus de la moitié de l’agréable opuscule. Du plus haut au plus humble, tous les serviteurs de l’Etat ont un jour, marqué de leur nom, les colonnes du Journal officiel. Les nominations de préfets, sous-préfets, courtelinesques chefs de bureau ou de sections d’Administration Centrale, mais aussi des conseillers ministériels, officiers de réserve, et jusqu’à celles des receveurs de trésor public de province, ces nobliaux du ministère des finances ; se doivent d’être mentionnés dans l’exhaustif quotidien.

 

Et puis, il y a ces listes de naturalisés récents qui, derrière chaque nom, derrière chaque ligne, dissimule des années de patience, d’attente et parfois de combat pour accéder enfin à cette dignité : être français.

 

 

Toute la vie est effectivement présente dans ces colonnes : depuis les résultats du foot du samedi ( qui valident les grilles du loto sportif) jusqu’aux condamnations civiles et pénales, depuis les demandes de changement de nom ( pitié pour les sieurs Cocu, les dames Salope ou Hitler qui se résignent à abandonner leur patronyme, à amputer leur identité pour ne plus subir railleries et humiliations) jusqu’aux informations parlementaires ; où la sécheresse du ton et l’austérité du propos coïncident mal avec la bonhomie rubiconde que l’on prête à nos parlementaires .

 

 

 

De telles histoires, de tels concentrés de vie ne sont, heureusement pas, l’apanage du JO, mais il est amusant de remarquer que les registres officiels recèlent parfois de véritables mines .

 

Ainsi, en parcourant le registre des délibérations du Conseil municipal, c’est non seulement l’histoire du village que vous découvrez, mais aussi la grande, celle du pays : querelles clochemerlesques autour de la Séparation  de l’Eglise et de l’Etat, pénurie et deuils des deux guerres mondiales, mais aussi flambée des prix de l’essence et du gaz apparaissent en filigrane, en contrepoint.

Parfois, certains événements font même l’objet d’un vœu, comme si l’appel à la paix d’une petite commune de France suffisait à surseoir à l’équilibre de la terreur.

Et puis, il y a ces métiers oubliés : piétons du téléphone, responsable du pont-bascule ; ces termes désuets : cantonniers, garde champêtre ( où sont passés les tambours d’antan ? ).

 

 

C’est, au contraire ; l’histoire de la famille et de la société que dévoile les livres d’état civil : les naissances à domicile se font de plus en plus rares, au contraire des divorces ou des enfants reconnus hors mariage ; avant qu’un jour, apparaissent les unions d’homosexuels et les baptêmes civils.

 

Au fil des pages et des années, on reconnaît quelques noms : untel, né au milieu du siècle, se retrouve trente ans plus tard à la page des mariages, puis hélas, quelques décennies passées, au rayon des décès …..

 

Ainsi va la vie, maîtresse des généalogies et des souvenirs d’enfance.

 

 

 


Publié dans Choses vues

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P
comme tu as raison de trouver cela delicieusement desuet. Je t´ecris d´un pays ou l ordinateur est une nouvelle religion ou le support electronique est la base de cette jeune democratie (16 ans d  age et le gouverneöent le plus jeune d europe),et aussi ou la moindre petite ligne d engagement de credit du maire de Tartu ou les crayons de papier du premier ministre a Tallinn sont consultables librement sur internet. transparence au combien louable ,...mais ici point d arrete de changement de nom  ou de decret organisant la manifestation de la fete patronale de la communaute de communes du pays de Gex (dans ta face)qui te tombe sous les yeux puisaue tu decides de ce que tu consultes et cest bien dommage <br /> Nägemist (demerdes toi)<br /> xav
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