Jury littéraire
La pile des livres à lire commençant à s'accumuler sur ma pauvre table de nuit, qui n'en peut mais, une partie du week-end et des soirs derniers a été consacré à la lecture d'ouvrages divers et variés, dont la critique fera l'objet de cette note (avec peut-être un caractère récurrent, comme dirait mon ami Jean-Claude PROPRE ) .
Passons rapidement sur le dernier Pennac " Chagrin d'école", que j'ai eu du mal à terminer . J'aurais d'ailleurs du suivre le conseil du dit auteur qui, dans "Comme un roman", donne au lecteur le droit de ne pas finir un livre. J'ai trouvé ce vademecum à destination des enseignants, hybride, entre autobiographie, souvenirs d'ancien combattant et réponses toutes faites, un peu creux et surtout rempli de bonnes intentions, en tous cas peu digne du prix littéraire qu'il a obtenu l'automne dernier.
Je me suis ensuite attaqué à "Le mouton dans la baignoire", témoignage plaintif des aventures d'Azouz Begag au ministère de l'Intégration. Si le livre est assez intéressant, et, reconnaissons-le, très bien écrit, c'est le personnage d'Azouz Begag, et ce alors que j'avais plutôt un préjugé favorable sur le dit ministre, qui m'a finalement déplu.
Ses ratiocinations incessantes sur le mépris, certainement réel de la classe politique et du microcosme médiatique envers la société civile, sa paranoïa aigüe, son assez haute opinion de lui, son sectarisme (pour un ancien sympathisant du Modem, prêt d'ailleurs à s'acoquiner avec n'importe quelle formation, pour peu qu'il soit en position éligible, je le trouve fort peu tolérant), son côté vélléitaire (voir le feuilleton de son investiture à Lyon) m'ont assez rapidement agaçé, même si je reconnais les qualités du sociologue et je respecte son itinéraire, fruit de la méritocratie républicaine ...
Le dernier ouvrage de cette trilogie improbable est, quant à lui, d'une toute autre qualité litttéraire, d'une incomparable profondeur et richesse . Il s'agit du "Rapport de Brodeck" de Philippe Claudel, déjà auteur des épatantes "Ames grises".
C'est l'histoire d'une petite communauté villageoise (une " Gemeinschaft", par opposition aux "Geselsschaft", les germanistes apprécieront), dans un lieu indeterminé mais dont le caractère germanique de la langue et des traditions, et la géographie du territoire évoquent l'Alsace, le Tirol ou les Appenzel (contrées à la fois montagnardes, relativement autocentrées et profondément conservatrices), à une époque indéterminée mais que la similitude avec des événements connus, et quelques indices sur le matériel ou les lieux (machine à écrire, gare) m'incitent à situer dans les années 30...
Je ne raconterais pas l'intrigue: je préciserais simplement que c'est un roman sur la mémoire et l'oubli, sur l'altérité aussi, à travers les réactions engendrées dans une petite communauté par l'apparition d'étrangers,ou par les comportements que certains assimilent comme déviants .
C'est aussi excellement bien écrit, avec un style épuré et un récit en cercles concentriques, avec des flash-backs et des réminiscences, qui de plus, monte en intensité et en gravité au fur et à mesure des chapitres.
J'en suis ressorti bouleversé .
A côté d'une telle oeuvre, les jérémiades de M Begag ou les leçons de M Pennac apparaissent bien vaines
Passons rapidement sur le dernier Pennac " Chagrin d'école", que j'ai eu du mal à terminer . J'aurais d'ailleurs du suivre le conseil du dit auteur qui, dans "Comme un roman", donne au lecteur le droit de ne pas finir un livre. J'ai trouvé ce vademecum à destination des enseignants, hybride, entre autobiographie, souvenirs d'ancien combattant et réponses toutes faites, un peu creux et surtout rempli de bonnes intentions, en tous cas peu digne du prix littéraire qu'il a obtenu l'automne dernier.
Je me suis ensuite attaqué à "Le mouton dans la baignoire", témoignage plaintif des aventures d'Azouz Begag au ministère de l'Intégration. Si le livre est assez intéressant, et, reconnaissons-le, très bien écrit, c'est le personnage d'Azouz Begag, et ce alors que j'avais plutôt un préjugé favorable sur le dit ministre, qui m'a finalement déplu.
Ses ratiocinations incessantes sur le mépris, certainement réel de la classe politique et du microcosme médiatique envers la société civile, sa paranoïa aigüe, son assez haute opinion de lui, son sectarisme (pour un ancien sympathisant du Modem, prêt d'ailleurs à s'acoquiner avec n'importe quelle formation, pour peu qu'il soit en position éligible, je le trouve fort peu tolérant), son côté vélléitaire (voir le feuilleton de son investiture à Lyon) m'ont assez rapidement agaçé, même si je reconnais les qualités du sociologue et je respecte son itinéraire, fruit de la méritocratie républicaine ...
Le dernier ouvrage de cette trilogie improbable est, quant à lui, d'une toute autre qualité litttéraire, d'une incomparable profondeur et richesse . Il s'agit du "Rapport de Brodeck" de Philippe Claudel, déjà auteur des épatantes "Ames grises".
C'est l'histoire d'une petite communauté villageoise (une " Gemeinschaft", par opposition aux "Geselsschaft", les germanistes apprécieront), dans un lieu indeterminé mais dont le caractère germanique de la langue et des traditions, et la géographie du territoire évoquent l'Alsace, le Tirol ou les Appenzel (contrées à la fois montagnardes, relativement autocentrées et profondément conservatrices), à une époque indéterminée mais que la similitude avec des événements connus, et quelques indices sur le matériel ou les lieux (machine à écrire, gare) m'incitent à situer dans les années 30...
Je ne raconterais pas l'intrigue: je préciserais simplement que c'est un roman sur la mémoire et l'oubli, sur l'altérité aussi, à travers les réactions engendrées dans une petite communauté par l'apparition d'étrangers,ou par les comportements que certains assimilent comme déviants .
C'est aussi excellement bien écrit, avec un style épuré et un récit en cercles concentriques, avec des flash-backs et des réminiscences, qui de plus, monte en intensité et en gravité au fur et à mesure des chapitres.
J'en suis ressorti bouleversé .
A côté d'une telle oeuvre, les jérémiades de M Begag ou les leçons de M Pennac apparaissent bien vaines